Urbanisation de SI : Comment piloter et suivre l’urbanisation d’un système d’information

Les informaticiens, admiratifs de la réussite de la plupart des grands projets du BTP, ont depuis longtemps été tentés de s’inspirer de ce domaine, en lui empruntant : Vocabulaire, méthodes, et principes. (Cf Merise 82).
La nouvelle tendance, qui consiste à s’inspirer des problématiques d’urbanisme est-elle vouée à plus de réussite?
Marc Desreumaux, est bien fondé de poser la question : «l’urbanisation des systèmes d’information : une problématique à qui on donne le nom de solution ?»


De notre point de vue, en effet, toutes les comparaisons de la problématique des SI avec le monde physique trouvent rapidement leurs limites, tant il est vrai que le caractère immatériel des SI leur confère des propriétés particulières (ubiquité, clonage, partage, extensibilité, mais aussi illisibilité…), qu’on ne retrouve pas dans les domaines contraints par les lois de la physique et de la gravité.


Que l’on soit tenté d’imiter des méthodes qui ont fait leurs preuves dans la construction d’autres artefacts est une chose, que ces méthodes soient efficaces en est une autre.
D’ailleurs, peut-on être si fiers des résultats obtenus dans les villes ? Embouteillages monstres, transports en commun inadaptés, pollution, insécurité, …


A tel point que les urbanistes eux-mêmes s’interrogent sur leurs approches et que certains s’interressent mêmes aux heuristiques de la programmation ! (Complexity and Urban coherence, Nikos Salingaros)
Nous constatons en effet que les démarches d’urbanisation des SI hyper-guidées, pêchent par une centralisation excessive de la conception.


Et comme le fait remarquer fort justement Michel Serres, dans son ouvrage Rameaux, «vous aurez du mal à trouver un seul outil, dont l’avenir coula dans le canal prévu par son concepteur».
Qui d’autre est mieux placé pour concevoir son outillage, que celui qui l’utilise?


Dans son récent ouvrage «comment les pattes viennent au serpent», René Reszhözi met en évidence que le développement de chaque organe d’un être vivant est délégué à un «gêne architecte».
Le principe de déléguer à chaque organe la responsabilité de se construire ou re-construire, par «autopoïèse» (Varella), en produisant du «soi» et respectant des règles, est une stratégie efficace observée dans le monde du vivant.
Nous avons pu constater que les solutions qui donnent les meilleurs résultats, sont celles qui avant tout, permettent de réduire le temps d’adaptation du SI, et gouvernent l’évolution du SI sur le long terme.


Réduire par une opération d’urbanisation, le nombre d’errements dans lesquels pourrait s’égarer une exploration anarchique des solutions possibles, constitue certes, l’acte fondateur d’une bonne gouvernance du SI.
Mais il faut garder à l’esprit que tout se joue après, dans les moyens mis en œuvre pour faciliter l’adaptation du SI sur le long terme.

Patrick SCHAMBEL